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Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé, Commission cantonale de la famille

Les Assises de la Famille : Les vulnérabilités psychiques et sociales des familles : Quelles barrières aux prestations ?


Lettre du mercredi 22 février 2017 - Source: Avenir Familles



La vulnérabilité : une définition générale
Le 13 juin prochain, l’association Avenir Familles s’emparera, en collaboration avec l’Université de Genève et le Pôle de recherche national LIVES, du thème des vulnérabilités et de l’accès aux soins lors de ses Assises de la famille, qui s’intituleront « les vulnérabilités psychiques et sociales des familles : quelles barrières aux prestations? »

Depuis la fin des années 90, le terme de « vulnérabilité » connaît une forte augmentation de son utilisation par les médias, les communiqués des associations et le monde universitaire. Pourquoi un tel engouement pour cette notion, que signifie-t-elle exactement et quels sont les liens entre vulnérabilités psychiques et sociales, c’est ce que nous vous proposons de définir en préambule aux Assises.

Des Temps Modernes aux Temps Incertains
La période historique que les sociétés occidentales traversent depuis quatre décennies se caractérise par une montée de l’incertitude, qui comprend cinq traits généraux (Spini, 2013) :

  • La dissolution des structures sociales propres aux trente glorieuses (1945-1975), qui inclut des changements dans les structures familiales (réduction de la taille des familles, augmentation des séparations, apparition des familles recomposées) et de profondes mutations sur le marché du travail (flexibilisation, précarité des conditions de l’emploi,…).
  • L’individualisation des modes de vie sous-entend que chacun est devenu responsable de ses choix de vie. La pression est constante d’opérer le bon choix, succès comme échecs étant les résultats d’options personnelles prises.
  • Le stress social se diffuse entre les différentes sphères de la vie, notamment le stress professionnel, avec la flexibilisation du marché du travail, qui a des répercussions sur la vie familiale.
  • L’Etat social est de plus en plus considéré comme incapable de répondre aux nouveaux risques sociaux (souvent par manque de ressources ou de volonté politique), tout en étant un acteur essentiel dans le soutien aux individus souffrant d’exclusion sociale.
  • La persistance, voire l’augmentation des inégalités sociales avec une tendance générale à une exposition croissante aux risques.

Dans une société qualifiée d’ « incertaine » ou de « à risques » (Beck, 1992), il est particulièrement crucial de comprendre pourquoi un individu trébuche, tombe, mais aussi résiste et surmonte les stress pour finalement progresser. C’est une préoccupation croissante des professionnels, des politiciens et des académiques.

La vulnérabilité : une notion interdisciplinaire
Le concept de vulnérabilité est une notion clé utilisée à la fois en psychologie, en sociologie et en gérontologie (Spini, 2017). Pour pouvoir utiliser le terme de vulnérabilité comme un concept commun des sciences sociales et de la psychologie, il faut voir la vulnérabilité comme une notion dynamique. La vulnérabilité n’est pas un résultat précis, mais un processus qui se déploie tout au long du parcours de vie.

Dans ce sens, la vulnérabilité est un processus d’affaiblissement et un manque de ressources dans un domaine de la vie (familial, social, professionnel, santé), qui, dans un contexte spécifique, expose un individu ou un groupe à des conséquences négatives dues à des sources de stress ; une incapacité à réagir efficacement aux facteurs de stress ; et une incapacité à récupérer des facteurs de stress ou à saisir les opportunités dans une période donnée. Cette définition est influencée par le modèle du processus du stress de Pearlin et al. (1981) et Pearlin (1989), qui distingue entre les sources du stress (événements critiques ou pression chronique), les médiateurs du stress (soutien social, stratégies pour faire face) et les manifestations du stress (symptômes externes).

Le processus de vulnérabilisation
Le processus de vulnérabilisation comprend trois composantes, qui sont les ressources disponibles, les facteurs de stress et les résultats. Les ressources mobilisables par les individus dépendent fortement de leur position sociale, de leur système de croyances et de normes, ainsi que des ressources dont ils disposent à un moment donné. Soumis à différents facteurs de stress (pression chronique, conflits, préoccupations quotidiennes, menaces, ruptures familiales, décès,…), chacun voit ses ressources suivre une dynamique de déclin et de perte, de stabilisation ou de consolidation.

La vulnérabilisation est un processus qui décrit les changements de ressources (sociales et psychologiques) à l’intérieur des différents domaines de la vie (professionnel, familial, social, santé, etc.) suite aux événements critiques de la vie. Les résultats de la vulnérabilité amènent à des situations d’exclusion sociale, de stigmatisation, de déprime, de fragilité, de violence, etc… Ils influencent ensuite, négativement ou positivement, le capital ressources dont dispose chacun pour faire face à d’autres événements futurs. La vulnérabilité n’est donc pas une caractéristique d’un individu particulier, mais le résultat de périodes critiques et de l’accumulation du stress au cours de la vie et est fortement structurée par la stratification sociale.

Les ressources d’un individu n’étant pas cloisonnées, les vulnérabilités sociales, économiques et psychiques d’un individu sont fortement liées entre elles. Jusqu’à quel point et quelles sont les influences des différentes dimensions l’une sur l’autre, notamment des vulnérabilités sociales sur les vulnérabilités psychiques, c’est ce que nous vous proposons de débattre le 13 juin prochain à l’Université de Genève en compagnie de professionnels, thérapeutes et scientifiques. Le recours aux institutions et l’accès aux soins seront également abordés.

Information et contact:
Après cette définition du cadre théorique, vous pourrez lire plus de réflexions pratiques dans notre prochaine newsletter du mois de mai. Le détail du programme de la journée vous sera également envoyé ultérieurement et paraîtra sur le site internet d’Avenir Familles. Plus d’informations peuvent être obtenues directement auprès des collaborateurs aux adresses courriels : jean.blanchard@avenirfamilles.ch et marie-eve.zufferey@avenirfamilles.ch

Références:
Beck, U. (1992). Risk society : Towards a new modernity. London, England : Sage.

Pearlin, L.I., Managhan, E.G., Liebermann, M.A., & Mullan, J.T. (1981). The stress process. Journal of Health and Social Behavior, 22(4), 337-356.

Pearlin, L.I.. (1989). The sociological study of stress. Journal of Health and Social Behavior, 30(3), 241-256.

Spini, D., Bernardi, L., Oris, M. (2017). Toward a Life Course Framework for Studying Vulnerability. Research in Human Development, 14, 5-25.

Spini,. D. (2013). Vulnerability across the life course : A theoretical framework and research directions. Lives Working Paper, 27. https://www.lives-nccr.ch/de/publication/vulnerability-across-life-course-theoretical-framework-and-research-directions-n832


Livre de la semaine


  • La famille dans tous ses états


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