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Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé, Commission cantonale de la famille

Devenir parents

Pourquoi on désire un enfant ?

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Lettre du mercredi 7 janvier 2015 - Source: Extrait de Echo Magazine, Pausa Pinto Gomes/La Croix



Aujourd’hui les couples veulent programmer les naissances, attendre le bon moment avant de donner la vie. Pourtant, le désir d’enfant échappe en bonne partie à la volonté.

Astrid et Nicolas sont en pleins préparatifs de mariage. Ensemble depuis quatre ans, ils rêvent d’avoir plusieurs enfants même s’ils n’ont pas encore réussi à s’accorder sur le nombre. «Moi, j’en voudrais trois ou quatre. J’ai grandi dans une grande fratrie où j’ai été très heureux et j’aurais aimé reproduire ce modèle, confie le futur marié. Astrid, elle, n’a pas cette culture de la famille nombreuse, donc je ne veux rien lui imposer.»

L’histoire de ce jeune couple est personnelle

niais son rêve de fonder une famille n’est pas si éloigné de celui de la grande majorité. Selon une récente enquête de l’Institut français d’études démographiques, la plupart des gens veulent avoir au moins un enfant. Seule une petite minorité affirme ne pas en vouloir du tout. «Il s’agit d’un élan naturel, l’espèce humaine étant soumise à la loi de la reproduction comme toutes les espèces vivantes, rappelle Monique Bydlowski, neuropsychiatre, psychanalyste et ancienne directrice de recherche à l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Ce qui nous différencie des autres, c’est de pouvoir dire non avec la contraception.»

Soif d’immortalité

Vouloir un enfant peut aussi répondre à une soif d’immortalité, un besoin de laisser une trace en ce bas monde. Ce désir s’inscrit également dans une histoire personnelle, il puise ses racines dans l’enfance: «Il y a un grand mouvement d’identification à ses propres parents, mais aussi au bébé que nous avons été, analyse Monique Bydlowski. A travers la maternité, il y a l’envie de retrouver le paradis perdu de la prime enfance». Chez la femme, il se construit dès la petite enfance en fonction du lien plus ou moins chaleureux qu’elle a entretenu avec sa mère; une absence de lien peut a contrario expliquer certaines infertilités psychologiques, selon la psychanalyste.

Depuis la généralisation de la contraception,

le désir d’enfant est toutefois devenu une démarche plus consciente. Ce qui le rend encore plus complexe. Cette liberté donnée aux couples – et notamment à la femme – peut se révéler angoissante, observe le psychanalyste Jacques André, professeur à l’Université Paris Diderot. «C’est terrible d’avoir à désirer un enfant. Cela entraîne une responsabilité très forte pour les parents de la naissance à l’âge adulte, constate Monique Bydlowski. La filiation était plus simple lorsqu’on ne maîtrisait rien.». La plupart des couples attendent que les conditions optimales pour accueillir l’enfant soient réunies. Des conditions où se mêlent des considérations matérielles et immatérielles. Même si le mariage n’est plus, pour la grande majorité des couples, un préalable, il leur faut d’abord s’assurer de leur stabilité affective. Pour 85% d’entre eux, avoir un enfant, c’est fonder une famille et, si possible, dans la durée.

Pas de bébé sans contrat

La plupart des futurs parents estiment également qu’il est important d’avoir un logement adapté et un travail stable avant de mettre au monde un bébé. «J’ai attendu d’avoir un emploi fixe avant d’avoir mon premier enfant, raconte Julie, maman de deux petites filles. J’avais besoin de cette sécurité professionnelle pour me sentir plus sereine.» Or le marché du travail, peu accueillant pour les jeunes, retarde de plus en plus ce moment. Si la décision d’avoir un enfant est aujourd’hui plus réfléchie, elle reste une liberté sous contrainte. Avec des conséquences qu’on ne maîtrise pas toujours. A force d’attendre le moment idéal, certaines femmes en oublient leur horloge biologique. «Lorsqu’on tient trop compte des préalables matériels, on se retrouve à 40 ans en fin de fertilité et c’est alors le cycle infernal des PMA (procréation médicalement assistée) qui commence, alerte Monique Bydlowski: Or, bien souvent, ce sont des contraintes qu’on se fabrique, estime-t-elle. Un enfant n’a pas besoin d’un confort idéal pour être heureux, mais de sécurité affective.»

Deux à trois ans minimum

Plus de la moitié des personnes interrogées par les sociologues mettent en effet moins d’enfants au monde qu’elles ne le désiraient au départ. Les raisons évoquées sont multiples: le recul de l’âge au premier enfant, la volonté de maintenir un écart suffisant (de deux à trois ans au minimum) avec le suivant, mais aussi l’exiguïté du logement, le coût de l’éducation d’un enfant supplémentaire, la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale. Le désir d’enfant révèle enfin la confiance en l’avenir des familles. Or, la majorité des jeunes parents interrogés se révèlent plutôt pessimistes, et pas simplement sur le plan économique: «L’abandon des règles de bonne conduite et l’individualisme des familles» ou «la course à la consommation» rendent, selon eux, l’éducation d’un enfant de plus en plus difficile. Si en France, ce pessimisme ne s’est pas encore traduit dans les chiffres, notamment grâce à une politique familiale particulièrement incitative, la plupart des pays d’Europe, dont la Suisse, l’Allemagne et l’Italie, se situent largement au-dessous du seuil de renouvellement des générations.



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