Des nounous de nuit viennent à la rescousse de parents épuisés

Lettre du mercredi 30 novembre 2022 - Source: Tribune de Genève
Besoin d’une bonne nuit de sommeil après la naissance de bébé ?
Cette semaine nous reproduisons en avant un article de la Tribune de Genève publié le 22.11.2022 par Lorraine Fasler “Des nounous de nuit viennent à la rescousse de parents épuisés”.
“Une nouvelle offre vient de voir le jour dans le canton et s’ajoute à celle de l’association Les 3 fées pour s’occuper des bébés à la nuit tombée.
Ce n’est pas un scoop: à la naissance d’un enfant, les parents connaissent un bonheur indescriptible, mais aussi une fatigue intense. Une étude anglaise pointait en 2018 qu’ils fermaient les yeux en moyenne 4 h 44 par nuit, soit 59% de moins que les huit heures généralement préconisées. Quel parent n’a pas rêvé qu’un tiers prenne le relais pour donner le biberon à 2 h du matin? C’est possible grâce aux nounous de nuit. À Genève, l’offre, encore restreinte, s’étoffe peu à peu.
Il existe par exemple les nounous de nuit de 022 Familles (anciennement Pro Juventute Genève), qui doit cette initiative à Joelma Dudouit. Elle a imaginé ce service après avoir longtemps travaillé comme assistante parentale et constaté la détresse de familles. «Le pic de la perte de sommeil des parents se situe lorsque le nouveau-né a 3 mois environ mais se poursuit souvent ensuite. Plus de 60% des jeunes mamans qui travaillent se disent épuisées».
Entre trois et quatre assistantes parentales de nuit sont disponibles du lundi au jeudi. Elles sont toutefois soustraites à l’offre de garde de jour de la fondation. Pour rappel, les «Mary Poppins» sont des emplois de solidarité (EdS) qui permettent de former et de réinsérer des personnes en fin de droits de chômage.
Les forces suffisent-elles avec un pool de 7 personnes? «Nous risquons de faire des frustrés, concède Ollivier Gross, directeur de la Fondation 022 Familles. Nous sommes en pleine phase de test et de recrutement.» Et la demande est importante. Au-delà des parents à bout de souffle, des institutions sont aussi en demande, comme des services pédiatriques ou l’Hospice général.
150 francs la nuit
Attention: lorsque ces assistantes viennent à domicile, il ne s’agit pas de baby-sitting. Si les parents sont invités à dormir sur leurs deux oreilles, ils doivent être présents dans le logement. Le service n’est pas à la portée de toutes les bourses. Comptez un forfait de 150 francs la nuit pour un nourrisson et 200 francs pour des jumeaux. Pour la garde de jour, Mary Poppins fonctionne avec des barèmes tenant compte des revenus des parents, mais pour la nuit, il s’agit, pour l’instant, d’un tarif unique.
«Ce montant découle du sondage que nous avons effectué en amont et correspond au prix que les gens étaient prêts à payer. Après quelques mois de fonctionnement, l’objectif est de basculer sur une tarification basée sur le revenu. Grâce au soutien de la Fondation de Secours Mutuels aux Orphelins (FSMO), nous pouvons adapter les tarifs pour les cas compliqués, comme le décès d’un parent», détaille Ollivier Gross.
Précisons que les assistantes parentales de la fondation sont payées au salaire minimum, avec une majoration de 25% pour les nuits, et que ce travail se fait sur une base volontaire.
Les 3 fées
Les nurses de nuit s’ajoutent à l’offre des 3 fées, qui s’occupent de garde nocturne depuis seize ans. L’association fait office de pionnière à Genève. Sa particularité? L’équipe est composée de baby-sitters étudiant(e)s en filière sage-femme à la Haute École de santé de Genève (HEdS). Telles les trois fées dans La Belle au bois dormant, elles se penchent sur les berceaux des tout-petits, entre 21 h et 7 h, offrant aux parents un sommeil royal.
L’association répond à un besoin réel. «On reçoit en moyenne 80 appels par semaine, sans parvenir toujours à suivre, car nous sommes une soixantaine de fées», raconte l’une d’elles, Alice Demay. L’étudiante de troisième année juge la rémunération «correcte» (150 francs la nuit, 200 pour des jumeaux).
«Nous ne sommes pas encore diplômées et pouvons dormir au moins quatre heures sur les huit, sur un canapé ou un lit d’appoint. Les bébés perçoivent le stress des parents. Ils sont souvent plus calmes avec nous, car nous arrivons reposées.» À la différence des Mary Poppins, Les 3 fées acceptent que les parents soient absents et interviennent durant la fin de semaine et les week-ends. Sans garantie toutefois que chaque demande aboutisse à une garde, faute de personnes disponibles.
Pour les étudiantes sages-femmes et les parents, c’est du gagnant-gagnant. «Le baby-sitting représente un revenu mensuel non négligeable à côté de mes études. Surtout, j’y gagne en aisance dans la manipulation des bébés. C’est gratifiant de venir en aide aux parents et de participer au travail de prévention des dépressions post-partum, notamment», précise Alice Demay.
Point de non-retour
Louise, une Genevoise de 38 ans, en sait quelque chose. Elle était arrivée en 2020 à un point de non-retour.
«Lorsque ma deuxième fille a eu 4 mois, elle qui faisait jusque-là des nuits plutôt correctes s’est mise à se réveiller toutes les heures. J’épargnais mon mari qui avait repris le travail. Je n’avais pas la force de la laisser pleurer, j’avais toujours peur qu’elle ait faim. C’était un cercle vicieux! J’ai tout essayé. Je ne demandais pas d’aide, car nous n’avions pas de famille dans la région et je pensais pouvoir y arriver seule. Je ne dormais plus, je ne me reconnaissais plus. Moi qui suis d’ordinaire forte et joviale, c’était terrible…»
«J’ai eu un déclic le jour où j’ai écrit à une amie que j’allais me jeter par la fenêtre. Les pensées suicidaires étaient réelles. Le soir même, j’appelais l’association sur conseil de ma sage-femme et le lendemain, Alice Demay venait garder mes enfants durant deux nuits. Elle avait beau avoir plus de dix ans de moins que moi, j’avais une confiance totale en elle. Ça a changé ma vie. Ma fille a compris que ce n’était pas mes bras et miraculeusement s’est mise à bien mieux dormir», confie Louise.
Depuis, la maman recommande ce service et a fait de la lutte contre l’idéalisation de la maternité une mission de tous les jours. «À chaque fois que je m’exprime sans tabou sur mon parcours, les masques tombent aussi en face, lance-t-elle. Aux jeunes parents, je leur dis félicitations, mais prenez soin de vous!»”
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Articles :
- “Parents, gare au burn-out” – Le Temps le 26.01.2022 par Marion Police ;
- “Le burn-out parental touche 5% des parents suisses” – RTS Info le 23.02.2020 par Fanny Moille/Margot Delévaux.
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